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Un départ

Elle le regarde partir sans trop savoir quand elle le reverra. Bientôt, ils se sont dit mais c’est vague. Elle n’aime pas cette incertitude mais elle n’a pas voulu faire la difficile et n’a donc rien dit. Elle le regrettera peut-être mais pour l’heure elle préfère se concentrer sur le positif : la possibilité d’un après, l’idée qu’ils se retrouvent ici ou là. En fait, elle a décidé de se satisfaire de ce qu’il lui donne. Rien de plus, elle n’aura pas d’attente. Elle sera facile, facile à sa manière. Le reste - le manque, l’inquiétude, l’ignorance - elle le met de côté. Les bonnes choses au début, n’est-ce pas ? Les bonnes choses aussi longtemps que possible tant qu’à faire. Les bonnes choses et puis voilà. Elle le regarde donc partir, ce garçon rencontré plus ou moins par hasard, et elle se dit qu’il n’est vraiment pas mal. Il y a quelques minutes, il était même dans ses bras, ils étaient juste tous les deux et c’était bien. Elle était bien. Elle irait même jusqu’à reconnaître qu’elle avait de la chance d’être là, même pour quelques minutes. Elle était bien à ses côtés, elle en avait oublié ses soucis quotidiens, elle s’était laissée emporter dans son monde ou plutôt dans leur monde ... Un nous sans calcul, un nous spontané. Un nous éphémère mais radieux. Une belle expérience ? Pas que … En effet, parce qu’il part et qu’elle le voit faire, elle se rend compte qu’il y a autre chose, qu’il a éveillé en elle plus qu’un bonheur momentané. Des sensations inespérées. Ce n’etait pas que des retrouvailles entre deux inconnus … Le regrette-t-elle ? Elle regrette en tous cas que le rendez-vous soit terminé, mais cela ne l’empêche pas, tout en le regardant s’éloigner, de se délecter encore un petit peu des plaisirs qui se sont joués en elle ces dernières heures. Plaisir du corps et du cœur couplés à un lâcher prise qu’elle ne connaissait plus. Elle ne sait pas ce qu’il adviendra du nous entrevu, mais cette parenthèse dominicale aura eu le mérite de la reconnecter avec elle-même et rien que pour cela, elle éprouve envers son Apollon du moment de la reconnaissance. En le regardant ce soir disparaître définitivement de sa vue, elle se sent frissonner. Les soirées se rafraîchissent, mais est-ce vraiment l'unique raison d’une telle réaction ? Non : elle frissonne par peur qu’il n’ait pas ressenti les mêmes choses qu’elle, qu’il soit parti pour ne plus jamais revenir, qu’il n’ait pas compris à quel point elle le trouvait attirant, à l’extérieur comme à l’intérieur. Elle a peur mais elle ne le lui écrira pas. S’il avait pu se retourner sans se mettre en danger, il aurait vu son sourire ... S’il avait mis pied à terre pour la regarder une dernière fois, il aurait lu sur son visage l’espoir, qu’elle nourrira désormais chaque nuit, celui de le revoir ... Il aurait pu et à défaut de l'avoir fait, elle se fiera à son corps, aux messages qu'il a tenté de faire passer. L’homme qui hantera ses rêves a désormais disparu de son horizon. Ainsi, il est plus que l’heure pour elle de s’en aller. La vie continue. Sa vie ne se termine pas là. Elle doit encore préparer la rentrée, travailler sur ses projets personnels. Elle ne doit pas cesser de prendre soin d’elle et de sa famille. Alors elle inspire un grand coup et fait un petit peu de rangement dans son esprit comme dans son cœur. Elle n’oublie rien du moment vécu, du nous en suspend mais elle veut revenir dans sa bulle. Elle doit rester forte face au monde qui l’attend et qui n’a pas changé. Elle se doit de continuer à être forte, mais peut-être peut-elle envisager à présent de l'être autrement ? Cette rencontre aurait-elle su lui faire voir les choses différemment ? Être forte tout en devenant expressive et avenante serait-il possible ? Se serait-elle trompée en faisant depuis plusieurs années coûte que coûte de l’amour sa bête noire ? Une faiblesse dont il faut se prémunir à tout prix ?!


Marine Sch.

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