Se jeter dans la gueule du loup

Quand tu autorises tes élèves à dire le mot gueule, ces derniers n’ont plus que l’expression « se jeter dans la gueule du loup » à te proposer en restitution de connaissances !

Ils n’ont plus que cette expression en tête ou plutôt dans … la bouche ! Car attention les enfants, même si vous êtes des animaux, pour vous, on ne dit pas gueule ! Au risque de se faire remonter les bretelles.

-Mais si on n’a pas de bretelles, on peut prendre le risque !

-Dis donc, tu n’as pas ta langue dans la bouche, toi !

-Bah si …

-En tous cas, tu n’as pas froid aux yeux.

-Bah non …

-Evidemment ! Revenons-en à nos moutons.

-Qui vont entrer dans la gueule du loup !

-Oui, là tu peux. Mais si tu parles d’un être humain, il faudra que tu utilises le mot bouche. En effet, en tant qu’être humain, vous avez un truc en plus des autres animaux, un truc qui vous rend sociable et distingué, qui vous empêche de considérer votre bouche et celles de vos semblables comme de vulgaires gueules !

Après cette mise au point lexicale qui m’a fait dévier de mon sujet premier, j’ose croire que le ferme ta ****** assez coutumier chez mes élèves sera désormais davantage réfléchi les jours où j’aurai le malheur de le réentendre dans … leur bouche.

Soit dit-en passant, si ces jours n’arrivent pas, ce serait encore mieux ! En effet, qu’elle soit pensée ou non, cette expression connue bien avant la leçon est une insulte : elle rétrograde son destinataire d’un rang dans l’évolution des espèces …

Certes, l’insulté a une gueule comme le loup en a une (et on l’imagine alors, tant qu’à faire, puissante et aux dents bien affûtées) mais, de ses confrères, il n’est pas envié … Car à ce prix, il se retrouve dénué de tout langage et devient un animal à part, relativement faible dans une société où prime la communication.

L’homme est capable de se servir de sa cavité buccale pour manier le language et ainsi s’exprimer et partager avec ses frères. Celui qui doit se la fermer, c’est alors celui qui ne sait pas faire et doit se taire pour ne pas nuire au reste de la fratrie …

Une insulte exclut, fait mal. Elle donne envie de monter sur ses grands chevaux voire d’en venir aux mains ! Elle est comme un poignard planté dans le cœur.

-Que d’expressions imagées, maîtresse !

-J’en connais un petit peu, en effet, mais attention : ma dernière phrase était une comparaison ! Elle me permet d’introduire votre leçon suivante …

Marine Sch.