Pourquoi je m’aime ?

« Sujet : Pourquoi je m’aime ? »

-Maîtresse, je ne peux pas répondre à une telle question : je ne m’aime pas.

-Il va pourtant falloir que tu écrives quelque chose … As-tu des amis ?

-Oui ! Plein même !

-S’ils sont tes amis, c’est qu’ils apprécient des choses chez toi, non ?! As-tu une idée de ce dont il peut s’agir ? Si ce n’est pas le cas, pose leur la question !

-Je crois que je suis gentil …

-Je le crois aussi.

-Je suis également amusant !

-Ah ! Bien ! dis-je en souriant à mon élève, encore en pleine réflexion. Il nous fera découvrir la suite de sa liste un petit peu plus tard, s’il le veut, lors de la mise en commun des productions. Pour le moment, je vois une nouvelle main se lever et me dirige dans sa direction.

-Oui ? En quoi puis-je t’aider ?

-Maîtresse, je ne suis pas narcissique. Je refuse d’écrire sur moi !

-Hum ! Ça pourrait être une excuse. Mais en réalité, le travail que je te demande de faire a pour but de t’aider à croire en toi, juste ce qu’il faut pour que tu avances dans ta vie avec confiance. Ce n’est pas une question d’amour surdimensionné. Ce n’est pas non plus un travail facile. Mais c’est important et utile que tu essayes de répondre à la question.

-Vous, vous connaissez vos qualités ? -Moi, j’ai du mal, comme toi, à les voir …

-Alors, vous aussi, vous pourriez faire l’exercice ?

-Tu as raison, je pourrais … Et je vais le faire, je vais essayer en tous cas, comme toi !

Il me sourit puis me regarde, docile, rejoindre mon bureau. Nous nous saisissons d’un stylo et en même temps, nous nous mettons à rédiger notre première phrase. Elle commence par « Je m’aime car … ».

La maîtresse que je suis à trouvé tant bien que mal trois adjectifs. Elle se voit gentille, généreuse et sérieuse. Ce n’est pas beaucoup mais suffisant comme exemples.

Ainsi, je reprends ma marche à travers les rangées de tables et lis par-dessus quelques épaules les textes qui prennent forme et s’étoffent au fil des minutes. Comme quoi, quand on s'accorde un petit peu de temps, des qualités, des talents et des victoires, on en a tous. Quel que soit notre âge.

Je m’arrête soudain auprès d’une petite fille qui a écrit qu’elle était bavarde …

Je réfléchis. De mon point de vue de maîtresse, je ne vois pas ça comme une qualité mais si je sors de mon rôle, très vite, je me rends compte que je suis contente pour elle. C’est une enfant qui s’exprime, qui va vers les autres, qui apprend à se faire confiance ! Notre travail ensemble l’aidera dans cette voie. Je m’en réjouis et je me sens alors, je le reconnais, un petit peu fière … Fière d’être à l’écoute de mes élèves, de vouloir leur être utile sur tous les plans de leur vie.

Je n’ai pas le talent d’être une bonne enseignante mais j’ai la qualité d’essayer de faire de mon mieux. Pour toutes choses entreprises et notamment pour celle qui consiste à permettre à chacun des enfants qui fréquente ma classe de rentrer chez lui, le soir, plus riche de connaissances mais aussi plus épanoui. C’est cool !

En fait, je m’appuie sur les programmes d’EMC mais aussi sur ma propre expérience pour mettre entre les doigts de quelques citoyens de demain des clés qui leur permettront, utilisées à bon escient, d’accéder au bonheur intérieur.

Marine Sch.