Mes textes
- Marine Sch.
- 24 déc. 2021
- 6 min de lecture
Des fois, je me demande ce que les textes que j’écris m’apportent.
Certes j’y mets du mien, je parle de ce que je ressens et je m’inspire d’événements que j’ai vécus, que j’aimerais vivre ou que d’autres ont vécus et m’ont partagés.
Je mets à l’écrit des pensées, des désirs, je dis et ne garde pas tout au fond de moi, à l’état inconscient.
J’aime aussi partager mes idées, et me dire que quelques personnes me lisent et savent comment je vais globalement en ce moment me fait plaisir.
Mais dans mes textes, je recherche aussi le littéraire. Je veux que mes lecteurs s’identifient ou soient touchés par ce que je raconte. Alors j’enjolive, je rajoute des éléments ou en omets d’autres.
Et puis, je ne me livre jamais totalement. Savoir ce que je ressens à l’instant où j’écris ne résume pas mon moral, ma santé de la période.
Ainsi des fois, j’ai envie d’arrêter d’écrire ou en tous cas, de ne plus publier et donc de ne plus jouer à l’écrivaine.
L’écriture est sûrement une thérapie pour moi mais est-ce que mes textes tels que je les conçois sont ce médicament dont j’ai besoin ?
J’en doutais et j’en doute encore plus aujourd’hui quand je me rends compte qu’après avoir réfléchi sur les normes qu’on s’impose, j’ai de nouveau perdu le contrôle …
Ceux qui me lisent depuis plus d’un an ont une idée dece que cela signifie : perdre le contrôle. Ce n’est pas donner un coup de volant pour dévier de sa route et tracer son propre chemin, sa destinée.
Ici, c’est négatif.
Il y avait une bonne intention avant cette nouvelle perte de contrôle, derrière l’acte de manger.
Il y avait l’envie de se faire plaisir, d’avancer, de se soulager aussi un petit peu après quelques jours d’angoisse.
Mais ça a dégénéré : d’un chocolat, je suis passée à la boîte entière puis j’ai continué avec d’autres aliments sans plus pouvoir m’arrêter.
J’ai beau me dire stop, voir les larmes couler et fondre dans le carton, je n’arrive pas à m’arrêter, je n’arrive pas à me pardonner mon écart.
Je suis en colère, je suis triste et j’ai mal.
Mal à mon ventre qui n’était pas prêt à ce genre de dégénérescence.
Mal à mon coeur qui me rend détestable.
Mal pour ma vie qui perd soudain tout son sens.
Je suis partie trois jours avec deux amies en Normandie. C’était superbe. Nous étions complices, nous étions joyeuses et vraies en même temps. Et voilà, comment je finis : la tête dans la nourriture.
Pourtant j’ai fait des efforts du côté des repas. Que s’est-il passé ? Pourquoi cette crise ? Toujours les mêmes questions une fois les limites de mon estomac atteintes, une fois que le tsunami a fait son massacre dans ma cuisine, dans mon corps, me laissant au sol épuisée et complètement perdue.
Je vois rapidement plusieurs raisons se dessiner, je vois que la chute était prévisible. Peut-être aurais-je même pu la contrer ?
Trop de stress, trop de confrontations avec ce que je veux être : une femme forte, indépendante, belle et libre et ce que je ne suis pas.
Trop de faim aussi. Car même si j’ai mangé mon premier hamburger depuis le début de la maladie, même si je me suis autorisée des crêpes, des chocolats, … ce n’était pas assez. On ne nourrit pas une jeune fille de mon âge et de ma corpulence de petits plaisirs.
J’ai failli à mon rôle, celui qui consiste à prendre soin de moi.
Et je faillirai encore tant que je n’ai pas appris à me pardonner et à accepter ce que je suis capable de faire …
Je parlais hier du contrôle dans nos vies et de la nécessité selon moi de lâcher la bride. Je pensais ce que j’écrivais mais je n’étais pas encore passée à l’acte …
À présent, c’est fait mais mal : de manière excessive. Comme d’habitude.
Je n’ai jamais cessé de réagir ainsi : tenter de changer et aller dans l’extrême inverse.
J’ai déjà parlé de juste milieu dans mes écrits parce que c’est ce à quoi j’aspire, en vain. Je dis que c’est l’idéal, qu’on a tous intérêt à le rechercher mais je ne suis pas bien placée en vérité pour donner des directives. Je suis moi-même en pleine quête.
Une quête qui s’avère sans fin au fil des ans …
J’écris, j’ai de bonnes idées mais je n’avance pas.
J’essaie mais chaque tentative qui se solde par un échec remet en cause mes conclusions : elles sont bien mais pas faites pour moi.
Moi, pour le moment, j’ai besoin de contrôle, de cadre, de sécurité. Je veux ma bulle et mes habitudes. Je veux arrêter ces efforts qui ne servent à rien. Ces envies que je ne sais pas honorer.
Je me sens différente, définitivement différente.
J’en suis triste mais je me résous à mon sort. Si j’arrive quand même à avoir des moments de bonheur, c’est mieux que rien.
Je ne dois pas penser ainsi, baisser les armes, je le sais alors je m’allonge et j’attends que le foutue pour foutue se calme dans mon esprit.
Avant je nageais des heures durant pour me remettre un minimum sur pied, pour que les aliments ingurgités servent à quelque chose. Quand nager ne fut plus possible, après une nuit de crises et avant un jour d’école, j‘évacuais le trop plein. Enfin, j’ai appris à
encaisser : ne rien faire, juste attendre que ça passe. Que ma haine de moi se range dans un coin de mon cœur.
Avant je « soignais » la perte de contrôle par encore plus de contrôle.
Aujourd’hui …
Aujourd’hui, à quelques jours de la nouvelle année, j’essaie de ne pas prendre de décision. Ainsi je ne décide pas de rester seule à Noël.
Je me laisse guider vers la voie du courage, celle qui consiste dans mon cas de figure à manger comme si de rien n’était au prochain repas, ainsi qu´à tous les autres dont ceux qui se veulent festifs.
Je continue à publier et fais ainsi apparaître ce texte dans lequel je me livre encore une fois avec beaucoup - trop - de transparence …
Je ne sais pas à quoi tous ces écrits servent et où ils vont me mener. Je prends des risques en les partageant : celui de décourager un petit peu plus mes amis, de dégoûter les mecs récemment rencontrés et que je suis censée séduire, d’inquiéter ma mère.
Je prends des risques mais je les assume. Le danger qui vient de l’extérieur n’est pas celui qui me fait le plus peur …
C’est moi que je crains avant tout.
Alors si écrire et partager, si dire la vérité voire avouer que contrôler est ma spécialité me permettent d’éloigner un petit peu le mal, de me regarder avec un minimum de compassion, j’ose.
Hier, j’ai refait une crise de boulimie. Je n’en avais pas faite depuis que mon ex m’a quittée, depuis un petit peu plus d’un mois. Ce retour n’est pas drôle. Il me met en colère. Cela me parait tellement idiot de se remplir l’estomac pour alléger ses souffrances.
C’est idiot : je le reconnais à 100% mais ça fait partie de ma vie. Les crises sont des points de bascule qui me construisent, qui contribuent à faire de moi celle que je suis. Rien de glorifiant, mais ce que je suis quand même.
Je suis une femme qui se bat contre elle-même.
Une femme fragile, méfiante, qui a peur du rejet et de l’abandon.
Une femme qui ne s’aime pas mais qui espère à terme se libérer de ses travers, se trouver.
Je ne sais pas si je m’aimerais sincèrement un jour mais si je peux rendre les gens autour de moi heureux, si je peux donner de l’affection à ceux qui tiennent à moi et aider les enfants dont j’ai la charge, alors, à défaut du contrôle, je n’aurais pas tout perdu.
Je suis loin d’être la Marine que vous entrevoyez sur les photos : dynamique et ambitieuse, patiente et exemplaire. J’ai mes failles et elles sont profondes, elles me font souffrir et me mènent à de véritables remises en question.
Je suis loin d’être celle que vous imaginez et en même temps il y a quand même une part de moi car la personne qui figure sur les clichés ça ne peut pas être quelqu’un d’autre …
Alors un jour, je guérirai.
Un jour, j’appliquerai mes propres conseils.
Un jour, je serai fière de celle que je donne à voir.
Un jour, moi aussi, je me regarderai avec tendresse.
Marine Sch.





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