1 er janvier et Cimetière du Père-Lachaise
- Marine Sch.
- 2 janv. 2022
- 4 min de lecture
Oui : j’ai bien passé le premier jour de 2022 dans un cimetière !
Quelle drôle d'idée ! Pourquoi ai-je fait cela ?
Parce que j'espère ainsi n’avoir pas à y remettre les pieds cette année : chose faite, plus à faire !
Plus sérieusement, je suis allée au Père-Lachaise car il ne s'agit pas de n'importe quel cimetière : c'est le plus grand cimetière parisien intra-muros et l'un des plus célèbres dans le monde ! Vous ne le connaissez pas ? Ou juste de nom ? Alors ne vous moquez pas de moi et tentez la découverte !
Je suis donc allée au cimetière du Père-Lachaise pour bien commencer l'année : en me cultivant ! En me baladant dans ce qui ressemble un petit peu au Panthéon, sauf qu'ici il n'y a pas de voûte pour cacher le soleil et qu'il vaut mieux passer qu'y trépasser !
Pour continuer sur mes bizarreries, sachez que cela fait longtemps que je projette de descendre à Gambetta pour aller me promener entre les tombes de Jean de La Fontaine et de Molière, pour ne citer qu'eux. Quand j'ai vu ce ciel bleu, si engageant pour sortir de chez soi, je n'ai pas hésité davantage à concrétiser mon désir et à mettre à rude épreuve ma joie de vivre ...
2022, l'année de l'action ?
Ma prise de décision tombait bien : une visite guidée débutait tout juste quand je suis arrivée. Je me suis greffée au groupe, après avoir promis à Jean-François qui me donnait 18 ans au lieu de 27 que je ne ferai pas comme une de ses précédentes clientes : je ne lèverai pas les yeux au ciel, à chaque fois qu'il me taquinera.
Je ne savais pas dans quoi je m'engageais ...
L'homme de 73 ans n'attendit pas d'en savoir plus sur moi pour nous emmener, le groupe et moi, au coeur de son lieu de travail ...
Il me demanda cependant tout en slalomant entre les tombes d'où je venais et ce que je faisais dans la vie. Maîtresse des écoles ? Métier peu reconnu et pourtant si important. Je suis touchée et le charme ne fait que commencer ...
Lorsque notre guide prend la parole, je perçois en effet tout de suite la passion qui l'anime pour le lieu où nous nous trouvons. Il ne se contente pas de nous faire la biographie de l'homme ou de la femme auquel nous rendons visite, il ponctue son discours de petites histoires et de blagues !
Je suis admirative et un petit peu envieuse de toutes ces connaissances que Jean-François a en sa possession. Je m'empêche cependant de prendre des notes pour me laisser porter par le flux de ses paroles. Je ne retiendrai pas tout mais je sais que de manière générale, je n'oublierai jamais cette visite au Père-Lachaise. Jean-François s'infiltre dans mon esprit comme un modèle tant par son savoir que par son don pour captiver l'attention. Dès lors j'aspire à lui ressembler.
Je suis hypnotisée par la capacité de notre guide à parler sur n'importe quel gisant que nous croisons. Sa visite reste organisée : il veut nous montrer certains endroits en particulier, ainsi nous allons bon train entre les différentes divisions.
Je suis ailleurs et le lieu participe bien évidement à ce dépaysement. Il y a 70 mille pierres tombales sous mes yeux, je ne vois pas la fin de leur alignement, seuls la tour Montparnasse et le rocher du bois de Vincennes arrivent à se profiler à l'horizon.

Moi qui ai toujours eu horreur des cimetières (si, si c'est la vérité), je n'ai été ce jour-là parcourue par aucun frisson de dégoût. En effet, grâce à mon guide, les femmes et les hommes que je rencontrais conservaient leur rayonnement d'autrefois. Ils restaient illustres même en reposant à mes pieds.
Jean-François nous a raconté plus d'une anecdote et il m'a fait rire à plusieurs reprises, tant il a de la répartie. Il a récité des vers et des aphorismes. Enfin, il a chanté sans aucune hésitation quelques refrains de chansons célèbres qui venaient ainsi illustrer à la perfection ses propos et l'objectif de sa visite : partager. Partager le bonheur d'être en vie.
La visite que j'ai réalisée dans cet endroit hanté par la mort était donc à l'opposé de la thématique : elle était vivante et inspirante pour l'avenir !
Cette visite n'a finalement en rien entaché ma joie de vivre, au contraire !
Elle m'a aussi donné envie de redécouvrir les sketchs de Pierre Desproges et les moments sombres de la vie d'Édith Piaf, ainsi que les chansons de Bashung et les poèmes d'Apollinaire.
Cette visite a été l'occasion pour moi de regarder le passé avec reconnaissance.
Elle m'a aussi conduite à repenser à l'actualité et à mon rôle d'enseignante. En effet, Jean-François nous a invités à nous recueillir sur la tombe de Tignous, l'un des dessinateurs de Charlie Hebdo tué lors de l'attentat terroriste du 7 janvier 2015 et sur celle de Suzon, 21 ans, assassinée au Bataclan dix mois plus tard.
Il ne faut pas oublier, il faut apprendre aux enfants à prendre soin de nos valeurs pour que de tels drames ne se reproduisent pas. Pour que les cimetières restent des lieux où on prend le temps de se souvenir et non de pleurer.
Face à ce petit rappel, j'ai commencé à m’agiter ... J'avais envie maintenant de retourner parmi les vivants pour entamer 2022, consciente plus que jamais de la chance que j'ai d'être vivante, en bonne santé, avec les cartes de mon avenir en main.
Merci Jean-François pour ce moment riche en connaissance et en aspiration, vécu à tes côtés.
Et encore une fois, belle année 2022 à tous.
Je vous souhaite 365 journées, "faites de joies, de peines aussi,
de ce bonheur tout simplement d'être vivant".
Marine Sch.



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