Journée du patrimoine - Le château de Villebon
- Marine Sch.
- 9 oct. 2020
- 8 min de lecture
Vous vous rappelez : faire des visites, je trouve ça super, car on sort, on voit du monde, on se divertit, et, en même temps, on apprend de nouvelles choses ! Les journées du patrimoine sont une occasion, parmi d'autres, pour vivre ce genre d'expériences, et, moi, j'en profite : hier, c'était les Invalides, aujourd'hui, c'est … C'est toute une histoire, qui a commencé « il y a fort fort longtemps » ! Je vais vous la raconter, mais, je vous fais l'impasse de deux ou trois ans, pour arriver tout de suite à mars 2020, un mois, dont les programmes d'Histoire feront bientôt référence …
En effet, il y a sept mois, la France, comme le monde entier, plus ou moins au même moment, a connu une crise sanitaire, sans précédent : les hôpitaux, à cause d'une arrivée massive de malades du Coronavirus, étaient débordés (ils manquaient à la fois de lits, de personnels et de matériel, comme des masques (ces fameux masques que nous avons, désormais, tous l'obligation de porter, signe que les choses ne se sont pas améliorées … (mais, là, je saute des chapitres)).
Pour essayer de limiter cette vague de patients, le président a instauré un confinement national, qui a débuté le mardi 17 mars, à 12 heures, précisément : la plupart des personnes (toutes celles, dont le métier n'était pas jugé indispensable à la survie du pays) devaient alors rester chez elles, sous peine d'amende. Ça a duré quasiment deux mois : à partir du 11 mai, nous avions le droit de nous déplacer dans un périmètre de 100 km, autour de notre domicile, sans justificatif (ça n'a pas l'air comme ça, mais ça a été un véritable vent de liberté pour les ex-confinés que nous étions !) …
Le fait de n'avoir le droit de sortir de chez soi uniquement pour faire ses courses ou promener son chien (autorisation non négligeable), pendant presque huit semaines, devait permettre de limiter le nombre de malades. Je vous traduis le raisonnement des politiciens, présenté alors sous la forme d'un slogan (« Si tu restes chez toi, tu sauves des vies »), tel que je l'ai compris : si tu ne sors pas, tu ne tombes pas malade, tu ne transmets pas le virus, tu ne participes pas, directement comme indirectement, à l'engorgement des hôpitaux, et donc la patrie te remercie !
Je ne critique pas la gestion de la situation, je ne la défends pas non plus : ce n'est pas l'objet de ce texte. Disons, seulement, que la méthode a ralenti la propagation du virus. Cependant, même si les médecins et les infirmiers ont réussi à s'occuper de la vague de patients, atteints du Covid-19, il a bien fallu qu'à un moment la population sorte de chez elle pour aller travailler, pour gagner sa vie et éviter davantage la casse (la baisse du salaire, la perte de l'emploi et la rupture conjugale !).
Ainsi un jour, nous avons dû reprendre physiquement notre activité professionnelle (physiquement, car les professeurs, entres autres, n'ont jamais arrêté, tant bien que mal, d'enseigner), pendant que le virus, lui, en profitait pour repartir en campagne de contamination …
À quoi a servi le confinement, me demanderait, à ce stade de mon écrit, un de mes élèves, avec l'innocence et la justesse de l'enfance ? À quoi a servi la confinement, si ce n'est à endetter encore un petit peu plus l'État, et, malgré les aides financières créées, à multiplier le nombre de chômeurs ? Bonne question ! À relativiser nos problèmes de tous les jours, aurais-je aimé répondre à ce genre d'interrogation. Mais, en réalité, le confinement nous a surtout permis de nous mettre sur pause. Une pause impressionnante, quand on y repense, toute la planète était, soudainement, sur le même mode de fonctionnement ….
Incroyable aussi, quand on regarde les photos, prises par d'intrépides journalistes, des rues désertes et calmes à perte de vue … Un paysage hors du commun, dont vous n'avez pas pu profiter, vous qui n'êtes pas propriétaire d'un chien (comme quoi, la chance d'avoir un animal de compagnie se rappelle à nous, même quand le monde ne tourne plus rond !).
Mais, peut-être, avez-vous, en contre partie, utilisé ce temps, dont vous disposiez soudain, pour vous occuper de vous-mêmes, par exemple en faisant une activité, que vous aimez mais qu'habituellement, dans la vie dite normale, vous ne pouvez pas réellement pratiquer ? Je vous parlerai, si vous le souhaitez, dans un autre texte de mon propre confinement, en tant que maîtresse, célibataire, avec trois classes à gérer à distance, depuis un studio, mais, pour le moment, dites-moi, est-ce vous qui avez crié sur les toits avoir lu en 60 jours seulement l'oeuvre de Marcel Proust (une œuvre composée de sept volumes et réputée pour ses phrases longues de plusieurs dizaines de lignes et ses descriptions à n'en plus finir) ?
Moi, je veux bien vous croire, si c'est la vérité ... Ça l'est ? Dans ce cas, je vous félicite. Personnellement, je n'ai lu que le premier tome, et ce n'était même pas par choix, puisqu'il s'agissait d'un livre étudié en classe prépa … Ah, vous aussi, finalement, vous vous en êtes arrêtés là ? J'aime votre franchise. De toute façon, ajoutez-vous, personne ne l'a vraiment lu ? Là, vous faites erreur. Ma mère, par exemple, a lu l'oeuvre intégrale de Proust ! Et elle n'a même pas eu besoin du confinement pour le faire (confinement, soit dit-en passant, qu'elle n'a pas vécu, puisqu'elle n'a jamais cessé de se rendre sur son lieu de travail … On glorifie le personnel soignant, les éboueurs et les caissiers de supermarchés, à juste titre, mais en énumérant ainsi nos héros, on oublie aussi un grand nombre de métiers … comme les guichetiers de la Poste ! Je ne veux pas vous inviter à en faire autant (enfin si …), mais, moi, j'admire ma mère, car elle aurait pu se mettre en arrêt maladie comme un bon nombre de ses collègues, mais non : masque ou pas masque, vitre plexiglace ou non, elle est montée au front et n'a jamais baissé les armes).
Je suis donc fière de ma mère pour plusieurs raison, notamment pour sa lecture d'« À la recherche du temps perdu » et surtout pour le plaisir qu'elle en a tiré.
En effet, elle n'a pas lu cet ouvrage pour prétendre, à qui veut l'entendre, qu'elle a lu Proust ! Non, elle l'a fait, parce qu'elle aime son style littéraire et son histoire. Parce que pour elle, le temps consacré à l'oeuvre était du bon temps, facilement trouvé …
La vie de Proust n'est donc pas un secret pour ma mère, et c'est en connaisseuse, qu'elle apprécie l'auteur aussi bien que le narrateur. Deux névrosés, reconnaît-elle, mais doté d'un talent fou pour le premier et d'une sensibilité unique pour le second.
Ma mère aime ses Marcel, au point que les lieux, qu'il a fréquentés de son vivant, sont devenus des destinations de sorties pour elle … et pour moi (car je me suis laissée embarquer dans l'aventure … avec joie : chaque visite, je vous le rappelle, valant selon moi le déplacement) !
Aller du côté de chez Proust, c'est alors pour moi à la fois l'occasion de passer du temps avec ma maman, une maman heureuse de prolonger, encore un petit peu, sa lecture, et de découvrir de beaux endroits !
Ainsi, nous sommes allées, avant le confinement, jusqu'au village d'Illiers-Combray, où se trouve la maison de la tante du petit Marcel : tante Léonie. Et nous y sommes retournées le 20 septembre, deuxième jour des journées du patrimoine !
Nous voilà arrivés au sujet du jour ? Presque …
Ce dimanche, nous avons vu ce que nous n'avions pas encore pu visiter dans le village … c'est-à-dire le restaurant « La Madeleine d'Illiers » ! Ne vous moquez pas : la dernière fois, nous n'avions pas réservé de table, et nous nous étions retrouvées à déjeuner dans un kebab … C'était bon, en plus c'était la première fois que nous allions dans ce genre de lieu de dégustation, toutes les deux. Mais ça n'allait quand même pas très bien avec le thème de notre périple : découvrir les lieux décrits dans une œuvre majeure de la littérature du début du XX ème siècle …
Alors nous nous étions promises de revenir, et, aujourd'hui, c'est chose faite ! En effet, en terrasse, en face de l'église, nous avons, notamment, dégusté la fameuse madeleine de Proust, toute chaude, faite maison : un délice, une réminiscence de … de ce qu'est de la bonne cuisine française, tout simplement !

Marine ? C'est comme ça que tu profites des journées du patrimoine : des découvertes insolites et des lieux exceptionnellement ouverts, en mettant les pieds sous la table ? Pourquoi pas : chaque restaurant offre une découverte culinaire unique !
Mais vous avez raison, si nous sommes revenues dans la région d'Illiers-Combray, ce n'est pas uniquement pour nous remplir agréablement la panse, c'est aussi pour découvrir un nouveau lieu, fréquenté par Marcel Proust enfant et surnommé dans ses livres « Le château de Guermantes ». D'ailleurs, nous avons rendez-vous à 15 heures, avec son propriétaire ...
Le château se situe à 20 minutes en voiture de la maison de tante Léonie et s'appelle, en réalité, « Le château de Villebon ». Enfin du lien avec le titre du texte !
Il s'agit d'un ancien château fort, construit au XIV ème siècle, avec des briques artisanales de couleur rouge et parfaitement conservé. Par exemple, les douves, qui entourent le monument, contiennent encore de l'eau. Pour entrer dans la cour intérieure du château, on passe aussi par un pont levis, que notre guide a manoeuvré sous nos yeux. Enfin, entre les quatre murs du monument, nous avons découvert un puits, qui permettait, en cas de siège, aux châtelains de vivre en autarcie, et le buste d'un ancien propriétaire : le célèbre Sully.
Aujourd'hui, le château de Villebon est encore habité, c'est donc un lieu de vie, pas uniquement pour la famille La Raudière, mais pour tous les habitants de Villebon aussi, puisque, deux fois par mois, une messe publique est donnée dans la chapelle du château ! Cette chapelle est située au fond du domaine et sert également de lieu de sépultures pour les quatre grandes lignées de propriétaires.
Dans le parc, nous avons eu la chance d'observer une harde de cerfs, dont les bois, comme chaque année avant la période de rut, en automne, sont en plein développement.
Nous avons terminé le tour de la propriété par un bâtiment, ouvert deux jours par an au public (carte VIP en poche) : le colombier, appelé également pigeonnier, lui aussi magnifiquement conservé. Certains détails de la description nous ont bien amusées, ma mère et moi : nous avons, par exemple, appris que la colombine (les excréments des colombes) est récupérée précieusement par les propriétaires de colombiers, car c'est un très bon engrais ! Elle était, autrefois, même prise en compte dans la dot des jeunes filles. Enfin, le pigeon se mange ….

Vous l'avez compris, nous avons été charmées par le château de Villebon, bien qu'aucune référence à Marcel y ait été faite … Est-ce pour ça que nous sommes repassées ensuite, pour la troisième fois de notre vie, à Illiers-Combray, avant de remonter sur Paris ? Oui et non.
Oui, car nous avons fait une balade dans le pré Catelan, un pré transformé en jardin public, qui a appartenu au grand-père de … Marcel !
Non, car j'avais repéré un salon du livres derrière l'église et avais très envie d'y aller (bonne idée ? Évidemment, même si je vais manquer de place dans ma bibliothèque plus tôt que prévu (alors que j'avais fait du rangement pendant le confinement !)). Quels livres ? Je vous les présenterai peut-être, mais, pour le moment, faites mois plaisir : dites-moi que, vous aussi, vous avez profité du week-end du Patrimoine, cette année ?
Marine Sch.
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